Avez-vous vu Mirta?

Posté dans : Société 2
Mirta Palma. De prime abord, ça sonne un peu station balnéaire espagnole, transats et cars Buchard. En s'y penchant de plus près, on constate que ce nom se rapporte à une femme de 53 ans qui risque de faire un "voyage" ...bien loin de l'image de vacances sur la Costa Brava.

Fin juin dernier, Mirta s’en va faire ses courses à la Migros. La banalité des emplettes chez le géant orange tourne bien vite en cauchemar. En chemin, place Bel-Air, une voiture folle déboule sur le trottoir et la renverse. La jambe en compote, elle est transportée au CHUV, où elle y restera une quinzaine de jours pour soigner ses multiples fractures. Menant l’enquête sur l’accident, quelques policiers viennent l’interroger et, suite à son témoignage, ils découvrent que cette dame originaire d’Equateur est sans-papier. Ils auraient pu omettre dans leur rapport que la victime est “une sans-statut”, la laisser se rétablir gentiment pour qu’elle puisse continuer à se rendre à son supermarché aux promos M-budget et à faire des ménages dans Lausanne pour financer les études de sa fille de 14 ans, restée au pays. Malheureusement, les histoires “happy end” n’existent que dans les télé-films ; Joséphine Ange Gardien n’est pas en mission dans la cité lausannoise ! Les agents “font leur job” (sans états d’âme ?) et ils balancent Mirta et son irrégularité. Alors qu’elle ne sait pas si un jour elle pourra correctement remarcher, ni qui paiera les frais d’hospitalisation et de réadaptation, elle connaît la date limite de son expulsion. Le 15 septembre au plus tard elle devra quitter la Suisse.

Depuis sept ans dans la capitale vaudoise, une formation universitaire de physique-chimie en poche, cette migrante s’est contentée de faire des nettoyages et repassages pour des employeurs bien souvent suisses. Cette femme de l’ombre rappelle qu’il existe, comme elle, entre 15’000 à 20’000 personnes séjournant au canton de Vaud sans autorisation et près de 5’000 pour la seule ville de Lausanne. Devenant une main d’œuvre très bon marché, malléable à souhait, invisible et expulsable en tout temps, elles sont l’expression même de cette délocalisation interne au pays : elles répondent, à moindres coûts, aux besoins de notre chère économie helvétique.

Les membres du Collectif Vaudois aux sans-papiers ainsi que quelques conseillers-ères nationaux-ales soutiennent cette migrante et se battent pour sa régularisation. Une demande de permis humanitaire sera d’ailleurs formulée à la fin de ce mois, en se basant sur des attestations médicales et sur d’éventuelles preuves de revenus. Pourtant, la mobilisation de personnalités n’est pas une garantie à un droit de séjour. Au contraire, il semblerait que les rares cas de migrants médiatisés se concluent par un vol en charter; histoire de montrer qu’on ne rigole pas avec la politique restrictive appliquée à ces personnes vulnérables, même quand celles-ci sont défendues par une bonne partie de la population civile. Quant au chef du département de l’Intérieur, Philippe Leuba, il assure que la « situation de santé [de Madame Palma] est un élément qui sera pris en compte » mais déclare en même temps qu’« on peut très bien voyager avec une jambe cassée »… Il ajoute aussi que « son cas sera étudié comme les autres » et sachant comme “ces autres” sont traités, Mirta a de quoi se faire du souci.

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Florence Métrailler

2 Responses

  1. Avatar
    Alx
    | Répondre

     Merci Florence pour cet article. C’est là qu’on comprend l’utilité et la place d’un média citoyen. 

  2. Avatar
    OdileMoy
    | Répondre

    C’est clair que Mirta est dans l’impasse. Heureusement qu’il y a des voix qui s’élèvent. Bravo au bondyblog de faire entendre la sienne. Merci de nous tenir au courant de la suite des événements.

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