Une vague nouvelle sur les bords du Léman

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Il y a 30 ans, la New Wave a submergé le monde de la musique. A-t-elle pour autant perturbé les rivages de notre lac et réussi à mouiller quelques tordus lausannois désireux de sortir du chaos punk des années 70?

On parle souvent de la New Wave comme d’une réaction esthétique à un mouvement punk légèrement crados. Le premier enseignement de ma quête historique à l’occasion des trente ans du mouvement musical, c’est que les deux groupes lausannois New Wave les plus connus de l’époque provenaient directement de deux formations punk. Ainsi deux membres d’ HLM formaient les I Scream (photo) en 1986 et les Six Pack changeaient de style pour devenir successivement les Agriculture Club, Jimmy Pampers et les Langes de l’Enfer (très classe!) puis The Bill.

Un peu déçu, je vous l’avoue. Un vrai punk dans mon esprit, ça restait punk toute sa vie, rien à foutre. La vision idéaliste de mouvements musicaux devenus des mouvements culturels forts n’est visiblement pas la plus réaliste, du moins dans notre ville. Théo, disquaire chez Disc à Brac, m’explique qu’à Lausanne dans les années 80, « les jeunes n’avaient que des bribes de ces musiques » diffusées plus massivement en Angleterre et qu’ « il s’agissait plus de mode que de réels mouvements musicaux ». Il m’apprend d’ailleurs qu’ « il n’y avait pratiquement pas de concerts en ville à cette époque ». Pour danser, le disquaire attendait par exemple patiemment la disco mobile Karma Music, « spécialisée dans ce style et qui diffusait les artistes New Wave les plus populaires, tels Joe Jackson et Police ». Malheureusement, les investigateurs n’organisaient que deux ou trois soirées par année.

La pénurie de diffusion permet donc d’expliquer quelque peu la faiblesse des mouvements culturels de l’époque, mais ce n’est pas tout. La New Wave a souvent et injustement été comparée à un style musical froid, triste ou kitch. « C’était loin d’être que ça! », s’enflamme Théo, « c’est surtout l’arrivée des synthés et de nouvelles expérimentations qui ont bouleversé la musique! ». Ainsi, ces « punks » lausannois de l’époque voyaient peut-être dans l’arrivée de la New Wave quelque chose de novateur et transgressif. Dans les années 80 à Lausanne, c’était pour ainsi dire punk de faire de la New Wave… Jugement que partage l’expert suisse de la musique des années 70 et 80, Lurker Grand: « le punk était devenu la ‘old wave’, les musiciens qui découvraient Joy Division chez leur disquaire, rentraient chez eux et commençaient à jouer comme Joy Division… ». En Suisse, et principalement de l’autre côté de la Sarine, le courant New Wave se développe fortement et devient une référence: « un style unique est né dans notre pays, on appelait ça la Swiss Wave! » ajoute l’auteur du livre Hot Love, swiss punk and wave 1976 – 1980 et administrateur du site www.swisspunk.ch.

Ces deux experts nous rappellent que la musique New Wave n’est pas une erreur de parcours ou une faute de goût mais bel et bien une évolution du rock vers des horizons parfois plus électroniques mais surtout plus réfléchis.  « Cette musique était très à la mode dans les milieux étudiants et artistiques. » déclare Lurker Grand, « ça dépassait les 3 accords power chord du punk… ». Théo se réjouit du regain d’intérêt que connais la New Wave actuellement: « le style est revenu en force il y a 3 ou 4 ans avec des groupes comme Franz Ferdinand ou les Editors », mais s’avoue moins emballé par ces groupes d’Electroclash qui utilisent des sonorités « old school » pour singer la musique de l’époque: « Les mecs, ils avaient pas le choix, c’était les sons qu’on trouvait dans les synthés… ». Bon, on veut bien excuser certaines sonorités dignes de claviers Fisher Price mais reste quand même les solos de saxophone interminables, la mèche qui rend aveugle, les épaulette d’un veston trop grand et les pantalons carotte… pour finir sur un cliché!

Crédit photo: www.myspace.com/iscreamlausanne

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Loïc

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