Ce que le Lausannois peut apprendre du Montréalais pour survivre à l’hiver

Ce que le Lausannois peut apprendre du Montréalais pour survivre à l’hiver

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Début d’année, le mercure fait le grand saut et les selfies de pommettes gelées commencent à fleurir. Oui l’hiver sera rude (ou pas). Etudions donc ce que Lausanne peut apprendre du cousin canadien pour s’en sortir vivant.

Votre humble serviteur étant actuellement en séjour à Montréal, il a pu observer avec acuité toute l’ingéniosité de nos amis canadiens (pardon, « canadz’iens », on est au Québec) face au froid sibérien qui caractérise leurs longs hivers. S’il est clair que, petits gâtés inconscients que nous sommes, notre saison froide est beaucoup moins crue et inhumaine qu’au pays de la feuille d’érable, nous avons indéniablement beaucoup à apprendre des Québécois. Tel un ethnologue revenu d’une mission de terrain, je vais donc m’efforcer de vous transmettre quelques observations retenues de la faune locale.

Leçon n°1 : Fini le défilé de mode

Une première évidence s’impose: le Montréalais a bien compris qu’on ne peut pas être beau et au chaud en même temps. C’est incompatible, sauf si t’as 900.- à flusher pour une Canada Goose. Il faut donc humblement se résigner à être moche et mal fagoté lorsque cela est nécessaire.Montréal_2

Attention, comprenons-nous bien: ça ne veut pas dire que les Canadiens s’habillent comme des sacs, juste qu’ils sont rationnels. Ils ne connaissent pas ce moment d’appréhension au moment de revêtir un accessoire à l’esthétique douteuse. Ils savent que c’est pour leur bien, et qu’il vaut mieux être dégueu et vivant qu’élégant et congelé. La coquetterie s’arrête là où commence le -25°C.

On verra ainsi foisonner les bottes d’esquimaux, les chaussettes hautes et collants superposés, les vestes surdimensionnées qui font de toi une brique ambulante, et des protections faciales à faire pâlir d’envie les Talibans les plus orthodoxes. Et toute cette non-élégance ainsi déployée ne saurait choquer quiconque, puisque chaque Montréalais a conscience de toute sa nécessité. D’ailleurs, si d’aventure tu devais trouver une astuce encore plus laide mais efficace, tes semblables t’emboiteront le pas sans hésitation.

Donc pour résumer : range tes beaux gants de cuir, sors les moufles de ski. Vire moi ces Uggs et chausse tes Kampfstiefels. Et surtout, SURTOUT, toi, le hipster bien-pensant, déroule ce bonnet trop retroussé et cache donc ces oreilles que je ne saurais voir.

Leçon n°2 : Y a pas d’heure pour le café

On a déjà adopté Starbucks. On a déjà adopté le café à l’emporter. Mais ce qui manque aux Suisses, c’est la surconsommation de boisson chaude, à n’importe quelle heure du jour et de la nuit. Des litres, que dis-je, des gallons de café, de cacao, de thé par jour, voilà comment le Canadien survit à l’hiver.

Montréal_3Il faut attendre le bus? Un p’tit café. Il faut passer d’un centre-commercial à un autre? Un p’tit café. Monter dans sa voiture froide pour rentrer du boulot? Un p’tit café. Et ceci sans distinction d’heure ou d’énergie à disposition.  On en est plus du tout à rechercher l’ostie de coup de fouet de la caféine, tout ce qui compte c’est ce fluide chaud qui rentre dans ta carcasse et réanime tes fonctions vitales.

Le Montréalais l’a bien compris, et ne reculera pas devant l’insomnie si un café à 23h peut l’aider à atteindre la bouche de métro la plus proche. De toute façon, ici, on travaille le jour et la nuit (a fortiori quand il fait nuit à 16h). Les rythmes de vie s’estompent. Le froid, lui, il reste. On prend les priorités les unes après les autres.

Lausannois, oubliez donc ce que votre médecin vous a dit sur les méfaits de la caféine. Le froid aura votre peau bien avant que votre vieux cœur commence à pécloter. Les boissons chaudes sont vos amis. Abusez-en la conscience tranquille. Tim Hortons veille sur vous.

Leçon n°3 : Savoir lâcher prise

Des deux conseils qui précèdent découle une conclusion somme toute logique : puisque tu ne peux pas faire plier l’ennemi, fais-en une partie de toi. Puisque l’hiver est trop fort, adopte-le. Dit autrement, il faut donc renoncer à sa zone de confort et embrasser de son plein gré toute la rudesse de la saison froide.

Pour le Montréalais, cela signifie par exemple passer ses longues soirée d’hiver à la patinoire plein air plutôt que regarder des séries emmitouflé dans sa couverture. Avoir du fun, c’est le meilleur remède contre l’hypothermie. Un des plus beaux exemples de ce dépassement est la vénérable institution qu’est l’Igloo Fest: un festival openair en plein moins de janvier, où l’on se trémousse sur des plaques de verglas par -15°C. Certains mettent des glaçons dans leur boisson. Les Canadiens, eux, empilent des gros glaçons pour en faire un bar (le problème de la boisson fraiche étant réglé par l’air ambiant).Montréal_4

Une fois ce mode de raisonnement adopté, il n’y a plus tant d’obstacles à votre épanouissement personnel. A Montréal, on ne range pas son vélo une fois les premiers flocons tombés. On arme sa bécane de pneus de tracteur et on fend la route tel un brise-glace. De même, les amateurs de course à pied pataugent sereinement sur ces 20 centimètres de neige fraiche tombés la veille. Ils ont bien conscience que c’est krissement plus chiant que le confort d’un sentier de terre ferme, mais ils ont lâché prise, et ils veulent courir. Alors voilà, ils courent.

Franchir le cap

Je conçois bien que le changement d’approche n’aille pas de soi, pour nous qui hurlons à la lune chaque fois qu’il faut dégivrer son pare-brise. Peut-être faut-il voir dans cette quiétude québécoise une influence des cultures amérindiennes appelant à vivre en harmonie avec la nature… Whatever, toujours est-il que, renoncer de soi-même, ça libère.

Si au plus profonde de votre être, vous vous sentez prêt à adopter cette philosophie, mais craignez qu’il n’en aille pas de même de votre fragile organisme, pas d’inquiétude: une solide portion de poutine vous dotera de tous les nutriments nécessaires. Avec de telles armes en main, le bout de route qui vous reste jusqu’au printemps devrait être “pô si pire”, voire même ben correc’.

 

 

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