Les confidences d’un flocon de neige – 1/2

Posté dans : Rien à voir 1
Les premières chutes de neige, le paysage change de couleur, le peuple change de pneus, les flocons se fendent la poire. L'un d'entre eux s'explique.

Règle de base: faut pas nous chercher. 

Mes potes et moi, quand on débarque, ce n’est jamais seuls. On vient en force. On rameute toute la famille et on fout un souk pas possible… Le cousin, le frère, le beau-frère, l’oncle, mon père, la soeur, le chien, grand-maman, tout mon clan et même ma belle-mère (c’est dire). 
Faut dire qu’on aime ça, semer la panique chez vous les humains. Ca nous fait bien marrer. 

Chaque année c’est pareil, on vous prend au dépourvu et vous paniquez comme des petites filles devant deux araignées velues. C’est la valse des quatre fers en l’air et des glissades de l’enfer, des tournés sur route hasardeux et des vautrées sur le bitume plein les yeux. Holiday on Ice, sans patins, sans musique, sans costumes ni paillettes et surtout (ne dites rien à la presse) sans ce plouc de Lambiel. 
L’été à peine terminé, les gens n’attendent pourtant que nous. Ecoute-les: “Raaa, vivement la bonne ‘dreuse bien fraîche…”; “Mec, on va rider au glacier le mois prochain?”; “Chéri, cet hiver promet moi de construire un igloo pour les enfants…”; et j’en passe. Je t’explique pas le courrier qu’on reçoit, la boîte aux lettres du fan’s club déborde, on a plus de vie. Alors on a décidé de se faire plaisir.

Il y a bien une date officielle de lancement inscrite dans notre cahier des charges, le 21 truc-much là, mais franchement, on s’en bat tous les cacahuètes. Nous ce qu’on veut, c’est la surprise, on est des indépendants, des mercenaires météorologiques en quelque sorte. D’ailleurs, même les mecs de Météosuisse se plantent, on pirate leur système informatique. Alors on se parachute au-dessus de vos têtes distraites quand vous vous y attendez le moins, très tôt un lundi matin par exemple. 
Quand le boss donne l’ordre, c’est du sérieux. Rangers cirées, lacets lacés, le visage grimé et des armes plein les poches, on saute le couteau entre les dents. Kowabungaaaaaa!!! Et ouais, à 4h30 pile, on est déjà agglutinés sur les routes, les arbres et les cours de vos baraques, postés en embuscade.

Deux heures après, le spectacle commence. On vous voit débarquer avec des tronches pas possibles, des yeux rougis par la douleur, tantôt remplis de désespoir et de panique, tantôt brillants de joie à la perspective de la poudre fraîche qui vous attend en montagne. Mais comme c’est lundi, ce qui vous attend, c’est le taf. Et là, mes potes et moi, on prend un malin plaisir à mater vos cernes du matin encore pendouillantes, le moment où vous êtes bien obligés d’enfiler un vieux training, vos moonboots de l’an 2, vos gants qui n’isolent plus depuis belle lurette et votre chapeau d’armailli, saisir le manche congelé de la pelle à neige et faire votre second devoir conjugal: “déblayer cette saloperie de cour”, comme vous dites si bien, avant même d’avoir avalé un café.

Ah merde si ça c’est pas drôle…

A suivre…

Michael De Pasquale

Michael

  1. Avatar
    AnneHonyme
    | Répondre

    Un peu de poésie dans ce monde de brutes, ça fait du bien…

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