Le romand pour les nuls – leçon VI

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Les francophones non-helvétiques imitent souvent l’accent suisse. Mais savent-ils parler le « suisse » ? Voici quelques notions à destination des voyageurs de passage à Lausanne…

2010 est bien reparti, les fêtes sont terminées. Vous avez mangé, vous avez bu, vous avez dormi, mais surtout, vous avez revu la famille. Vous, suisses romands qui grossissez les agglomérations genevoise, lausannoise ou neuchâteloise, vous êtes ainsi rentrés dans votre village d’origine, vous êtes allés souhaiter les bons vœux à la grand-mère ou le grand-oncle restés dans la région. Et, sans le savoir, vous vous êtes fait une cure de suisse romand, le bon, le brut, celui qui fleure bon le gruyère, le vacherin et la raclette. Vous l’avez encore dans le nez, vous ne serez donc pas trop dépaysés par cette nouvelle leçon de romand pour les nuls!

Lors de votre dernière promenade au bord du Léman, vous vous êtes dit : « de bleu, il fait quand même rudement froid ces temps… vivement l’été, qu’il fasse grand beau et qu’on puisse faire des grillades. ». Seulement voilà, vous avez pensé tout haut, et l’ami français qui vous accompagne vous fixe, interloqué. Comme il fait froid, vous ne vous êtes pas attardé là en attendant qu’il comprenne de lui-même : vous lui avez directement révelé que vos paroles signifiaient « vivement l’été, qu’il fasse beau et qu’on puisse se faire un barbecue ».

Pendant les vacances, vous êtes allé rendre visite à grand-maman à Carouge, et celle-ci semblait tracassée : elle avait récemment appris que le fils de la voisine gâte l’école. Vous êtes rappelés que vous étiez à Genève, ce qui signifie que le chérubin fait de l’école buissonnière.

Pour le Nouvel An, vous êtes montés, autrement dit, vous êtes allés en montagne. Vous avez loué un chalet avec des amis, mais n’aviez pas prévu que vous seriez autant. Résultat : pour dormir tous dedans, c’était tout cougné, bref, vous étiez serrés.

Le Noël en famille a été l’occasion de faire des jeux de société. Vos petits neveux avaient ramené une valisette de poker, à la vue de laquelle vous avez fanfaronné en soutenant qu’au temps de votre service militaire, vous détroussiez vos camarades de chambrée en quelques donnes. Vous avez dû néanmoins déchanté assez vite et reconnaître que ces enfants-là sont bien trop malins : ils gagnent à tous les coups. Pas question cependant d’avouer que vous avez perdu de votre superbe. Pour sauver la face, vous avez quitté le salon en insinuant qu’ils avaient pougné. Personne n’a bronché, mais tout le monde dans la maisonnée sait bien que les gamins n’ont pas eu besoin de tricher pour vous battre !

En parlant de tricherie, mauvaise nouvelle : votre petit cousin, étudiant au gymnase à Genève, a été pris en train de mascogner à un examen. Décidemment, les jeunes ne sont plus ce qu’ils étaient : de notre temps, on ne se faisait jamais attraper !

Il est une autre chose pour laquelle il convient de rester discret, même si l’enjeu est différent : lorsqu’on se pougne

Petit dernier, hors thème : des traitillés. Voilà quelque chose que j’ai entendu pour la première fois en venant ici. Ce joli mot est aux traits ce que les pointillés sont aux points.

Et terminons avec un petit jeu ! Tout d’abord, un belgicisme : qu’est-ce qu’une « latte » au plat pays ? Indice : tous les enfants en ont une. Et un helvétisme : qu’est-ce que la « papotche »? Indice : pluie sur neige.

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Etienne

7 Responses

  1. Avatar
    funambuline
    | Répondre

     Il me semble, quand j’entends nos voisine français imiter soi-disant l’accent suisse que c’est en fait l’accent haut-savoyard dont il s’agit.

    Et sinon, à Fribourg, on schwenz l’école ou on courbe, pour faire l’école buissonière.

  2. Avatar
    Seb
    | Répondre

    Une latte belge est une règle, pour tirer des traits droits 🙂
    Alors qu’une bonne paire de lattes suisse permet de faire du ski.

    On peut donc en déduire que la longueur de la latte dépende l’altitude ;D

    • Avatar
      etienne_doyen
      | Répondre

       
      Bien vu Seb!

      Merci funambuline pour cette petite précision. Autre déclinaison locale, le pougner vaudois et le mascogner genevois ont leur équivalent jurassien : chinder.

      La papotche ou papètche, c’est donc bien de la boue, de la gadoue.

      • Avatar
        Anonyme
        | Répondre

        Est-ce que le “cougner” (être serré) aurait un rapport avec le liégeois “s’cougnî” (baiser) ?

        • Avatar
          etienne_doyen
          | Répondre

            Aucune idée! Dans “s’cougnî”, je perçois “coucougnette”, soit testicule… c’est le seul rapport que je vois. Amis linguistes, une idée?

          • Avatar
            Loïc
            |

            visiblement cougner vient simplement de “coincer”… donc peut-être la même origine, mais avec une interprétation différente pour les Belges (qui s’amusent comme des p’tits fous dès qu’ils sont tous serrés…)

          • Avatar
            Jules
            |

            Schwenzer et courber les cours s’utilise aussi à Neuchâtel et dans le jura.

            Sinon, le “chinder” jurassien s’utilise aussi pour désigner le fait, lors d’une partie de yass, de ne pas jouer la carte la plus haut qui permettrait de prendre le pli, dans le but de faire croire qu’on ne l’a pas et mieux l’utiliser plus tard. Haa! T’as chindé ton as?! Je croyais que c’était Loris qui l’avais!

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