Lausannois, Lausannoises, buvez Lavaux!

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Si l'inscription du vignoble vaudois au patrimoine de l'UNESCO est une reconnaissance mondiale, les habitants du chef lieu font les timides devant les caveaux. Rencontre avec le vigneron Pierre-Luc Leyvraz.

Un quart d’heure de train depuis le centre de Lausanne et me voilà à Chexbres. Le temps est couvert mais le lieu reste magique. Les ceps recouverts de neige semblent hiberner avant l’arrivée des premières feuilles au printemps prochain. «Lorsque je répare un mur, je pense à ces moines qui s’en occupaient plusieurs siècles auparavant», me raconte le producteur devant un panorama des vignes d’appellation St-Saphorin.

L’histoire de Lavaux commence des millions d’années auparavant, lorsque les glaciers ont ciselé un paysage abrupte sur les bords du lac Léman. Il a fallu attendre le XI ème siècle pour que les moines défrichent les pentes et construisent des murs à l’aide de pierres déposées par les glaciers. Un millénaire plus tard, le vigneron se sent comme investit d’une mission, celle de perpétuer le travail ayant permis la reconnaissance de l’UNESCO. Car si la nature a offert un terrain propice, c’est bien l’homme qui a entassé des pierres avec une précision diabolique sur plusieurs centaines de kilomètres.

Pierre-Luc Leyvraz doit certes entretenir les constructions, mais son métier est avant tout de faire du vin, et du bon. Son blanc « Les Blassinges » 2007 a récemment été couronné meilleurs chasselas vaudois par le label de qualité « Terravin ». Une récompense parmi d’autres qui permettra de continuer à bien vendre. L’année 2008 aura été d’ailleurs très bonne. Est-ce une conséquence de la publicité faite à Lavaux grâce à l’inscription au patrimoine mondial? « Il est possible que cela joue un peu. C’est vrai que des vinothèques de Suisse allemande m’appellent et me disent: “Il nous faut un Lavaux! ». Mais rien ne remplace finalement la qualité du produit pour une bonne communication. Ainsi un article « coup de coeur » du spécialiste des vins dans la Weltwoche lui a valu un très grand nombre de courriels.

La région jouit aussi de l’arrivée de nombreux touristes, comme les Japonais « que l’on voyait peu avant », et les vignerons s’organisent pour bénéficier de cette nouvelle clientèle. Un point de vente commun verra donc le jour aux anciens moulins de Rivaz et les caveaux restent accessibles à la dégustation ou à l’achat. Pierre-Luc Leyvraz s’étonne d’ailleurs de voir peu de Lausannois franchir sa porte. Il y a comme un paradoxe dans le fait que les Vaudois ont largement soutenu l’initiative pour la reconnaissance de Lavaux, mais ne rentrent pas volontiers dans les caveaux. « Les gens s’imaginent les vignerons comme des rustres, mais la plupart sont très accueillants », rassure-t-il.  Mais rien ne remplace finalement la qualité du produit pour une bonne communication. Si Pierre-Luc Leyvraz vend bien, ce n’est par contre pas le cas de tous ses collègues, notamment à cause de la concurrence des vins étrangers.

Le vigneron est néanmoins optimiste. Il voit en l’inscription à l’UNESCO un « plus » intéressant mais sait qu’il s’agit d’une somme d’efforts qui feront de Lavaux une région reconnue dans le monde du vin. Comme ces pierres que les moines entassaient une à une.

Loïc Delacour

Loïc Delacour

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