Lausanne vue par les guides de voyage

Lausanne vue par les guides de voyage

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Un guide de voyage dresse le portrait d’une ville autant qu’elle invite ses lecteurs à l’explorer. Et il se trouve qu’en consultant les chapitres sur Lausanne du Routard et du Lonely Planet, on y découvre pas mal d’anecdotes croustillantes et d’infos insolites, dont certaines auront peut-être jusqu'alors échappé aux Lausannois.e.s les plus averti.e.s.
Ambiance à Vidy, fin juillet. (CC by Yoan)

En période estivale, Lausanne se vide. Aussi entre fin juillet et début août, tout paraît plus simple pour celui qui reste en ville: le trafic retrouve la fluidité qui devait probablement être la sienne dans les années 60. Résultat: un temps de trajet significativement réduit pour rejoindre son lieu de travail au point que ça en devient (presque) une partie de plaisir. Quant aux files aux caisses des supermarchés: volatilisées! Du côté de Vidy, les plages, prises d’assaut dès que le seuil des 20 degrés est franchi, redeviennent relativement accessibles durant cette longue parenthèse estivale: le troupeau qui les occupe habituellement est partie en transhumance, notamment sur la côte méditerranéenne.

Les Lausannois visitent le monde, le monde visite Lausanne

Pour qui reste à Lausanne aux mois de juillet-août apparait un heureux constat: le départ en masse des vacanciers est ressenti comme une période de répit bienvenue, d’invitation à la décompression et par conséquent, d’une douce quoi qu’illusoire sensation, d’être soi-même en vacances.

Mais qu’on ne s’y trompe pas: pendant que les Lausannois visitent le monde, le monde visite lui-aussi Lausanne. La ville figure en effet en septième position des villes les plus visitées de Suisse, derrière Zurich, Genève, Bâle, Davos, Zermatt et Lucerne. Aussi, faisant cette année partie des Lausannois sédentaires, je me suis demandé, en cette haute saison touristique, ce que les guides de voyage étrangers consacrés à la Suisse pouvaient bien dévoiler de ma ville d’adoption. Et ce que le chapitre qui lui est dédié dans ces différents guides, dévoilait pour encourager le visiteur à faire une halte «par chez nous»? Après avoir consulté le Routard et le Petit Futé (français), le Lonely Planet (australien) et le Rick Steves (américain), j’en ai puisés quelques éléments de réponse avec quelques extraits que voici.

Lausanne, une ville inclinée peuplée de «jambes fermes»

«[Lausanne est] connue pour son ambiance enjouée, peut-être due à son emplacement enviable (les panoramas de cette extrémité du lac sont plus spectaculaires que ceux de Genève) et de sa population étudiante à la fois intello et ayant une certaine propension à faire la fête. Avec une telle entrée en matière et une mise en scène aussi élogieuse, difficile pour le Lausannois de dissimuler sa part de chauvinisme et de ne pas saluer ce beau tableau brossé par le Lonely Planet.

«Si son origine citadine est l’une des plus anciennes de Suisse […] si elle est placée sur une ancienne voie romaine d’importance stratégique […] elle n’était encore, il y a deux siècles à peine, qu’une gentille bourgade… C’est entre 1869 et 1910 qu’elle a connu un développement fulgurant, grâce à son climat, ses paysages, ses hôtels et ses écoles». Tels sont les termes introductifs du Routard dans son chapitre sur Lausanne. Avant de nous rappeler qu’elle est aujourd’hui devenue la quatrième plus importante ville du pays et qu’au regard des éléments historiques évoqués précédemment, «les Vaudois des campagnes traitent volontiers Lausanne de parvenue”». Tiens donc…

Difficile pour qui visite l’esplanade de la Cathédrale, de résister à la tentation du selfie. (CC by Yoan)

«Pour le visiteur, Lausanne est la ville que l’on ne cesse de monter et descendre», poursuit Le Routard. En effet, aucun des guides mentionnés ici ne fait l’impasse sur la forte inclinaison qui caractérise tant Lausanne. Rick Steves prévient qu’«il n’y a pas d’autre moyen de voir cette ville qu’en l’escaladant», et invite au passage le visiteur à apprécier la fermeté des jambes lausannoises («enjoy the firm legs»). Manifestement pas insensible à ce trait physiologique singulier, l’auteur américain rappelle ici une réputation qui colle à la peau des Lausannois.e.s et qui semble résister à l’épreuve du temps, alors que l’apparition des transports publics et le premier tramway inauguré en 1896, devraient avoir selon toute vraisemblance provoqué un certain ramollissement des cuisses et des fessiers. A moins que nous ne soyons ici en présence de ce qu’il conviendrait alors d’appeler «un miracle de la nature»?!

Lausanne, une ville culturelle

La rosace de la cathédrale Notre-Dame. (CC by Yoan)

Les différents guides ne tarissent pas d’éloges quand il s’agit d’évoquer le bouillonnement culturel et l’énergie foisonnante de Lausanne. Pour le Petit Futé, «Lausanne arbore un dynamisme digne d’une grande métropole». «Lausanne a l’énergie et le raffinement culturel digne d’une grande ville», ajoute Rick Steves. Pas inintéressant non plus, la rédaction du Lonely présente ce qui distingue selon elle Lausanne de sa grande sœur Genève: «Tandis que Genève semble se concentrer sur le passé et sa réputation d’accueillir plus d’organisations internationales que partout dans le monde, Lausanne regarde vers l’avenir.»

Côté culture et patrimoine, la cathédrale est unanimement reconnue comme un chef-d’œuvre («le plus bel édifice gothique de Suisse» d’après Le Routard). Un bémol toutefois: le guide français remarque (à juste titre selon moi) qu’«on ne peut que regretter la dernière restauration en date; nécessaire sans doute mais sauvage, sans aucune finesse!». Le musée des Beaux-Arts est également encensé, tout comme le musée olympique d’ailleurs, que le Lonely considère comme «le plus somptueux des musées lausannois et une halte essentielle pour les passionnés de sport». Quant au musée de l’Art Brut, les propos employés par les rédacteurs du Routard pour relater l’expérience vécue lors de leur visite sont dithyrambiques: «Un musée unique, exceptionnel, à ne manquer sous aucun prétexte. Jamais nous ne sommes ressortis d’un lieu d’exposition aussi fascinés, aussi remués!». J’ose du coup à peine cacher ma honte de n’y être jamais allé… A propos du Festival de la Cité enfin, Le Routard le trouve génial au point de l’apparenter à un «petit festival off d’Avignon»!

Lausanne, une architecture bigarrée

Église Saint-François. (CC by Yoan)

Le Routard n’hésite pas à parler de «cocktail» pour définir l’identité architecturale de Lausanne, une ville où «se côtoient de beaux édifices et des bâtiments beaucoup plus improbables…». Le même guide tient son hypothèse pour tenter d’expliquer cette réalité: «ceci serait peut-être dû au développement rapide de la ville alors que jusqu’à la fin du XIXe siècle, il n’y avait aucune obligation de soumettre la construction privée à des règles établies». Certes mais ça n’a pas empêché la ville d’autoriser la construction d’autres croûtes bien après que lesdites règles aient été mises en place. L’abominable bâtiment de l’administration communale à Chauderon, construit dans les années 70, n’est qu’un exemple parmi tant d’autres…

A propos de la place Saint-François, les mots du Routard sont sans concession: «celle qui fut vraisemblablement l’une des plus belles places du pays a été joyeusement saccagée au cours du XXe siècle. La moitié nord est heureusement réservée aux piétons mais sans grand intérêt…». L’église du même nom permet toutefois de réconcilier la rédaction du guide français avec cette place: «le temple (XIIe siècle) a été longuement mais superbement rénové. Dans la chapelle face à la chaire, un chef d’œuvre: “Le Christ appelant à lui les foules”, vitrail d’Alexandre Cingria».

Le Rolex Learning Center, à l’EPFL. (CC by speredenn)

Le Lonely Planet et Le Routard encouragent également le lecteur à découvrir le Rolex Learning Center, en particulier pour «les étudiants en architecture et les fans de design ultra-moderne». Les guides mentionnent tous deux la forme singulière de l’édifice, qu’ils apparentent à «une tranche d’Emmental» (Lonely Planet) ou «de Gruyère» (Routard). A ce stade, il faudrait vraiment que l’on nous explique pourquoi un pays situé au bout du monde, qui ne possède pas la moindre culture du fromage, parvient à fournir une bonne information en nommant la variété dont il est question avec exactitude, quand notre voisin français, censé être maître en la matière, s’évertue à proférer des contre-vérités.

Lausanne, un haut-lieu de la vie nocturne

Le D! Club. (CC by Yoan)

«Lausanne a la réputation d’apprécier la vie et de savoir comment faire la fête (en termes suisses) dans des endroits aussi diversifiés que des repères d’étudiants, des cafés citadins intello et des bars raffinés au bord de l’eau», dixit le Lonely. On note au passage le regard un brin hautain (quoique pas tout à fait infondé) porté sur ces suisses un peu trop sages, qui, lorsque la fête est engagée, se conduisent de manière plutôt contenue (et conséquemment moins tapageuse) que leurs semblables anglo-saxons.

Naturellement, le Flon, avec ses bars et ses restos à foison, est présenté comme le cœur de la vie nocturne lausannoise. Côté clubbing, le MAD et le D! Club, mais aussi Le Romandie, sont vivement recommandés. Pour ce qui est des bars, outre les «classiques» Saint-Pierre, Great Escape et Bleu Lézard, le Lonely relève dans un encadré une spécificité toute lausannoise: les bars nichés sous les ponts. «Where there’s a bridge, there’s a bar. At least that’s how it works in artsy Lausanne…». On apprécie autant l’élégance de la formule pour décrire Les Arches et les Grandes Roches que l’analyse pertinente qui en est faite, du moins en ce qui concerne l’enseigne située sous le pont Bessières: parmi la clientèle, les moustaches, les chemises à carreaux et autres pantalons slim sont en effet légion.

 

Lausanne, une ville verte et lacustre

Le Routard débute sa présentation d’Ouchy en ces termes: «La commune libre d’Ouchy (une plaisanterie carrément officielle…»). En les lisant, j’ai été ravi de remarquer que je n’étais pas le seul à qui échappait toute la dramaturgie construite autour de l’indépendance d’Ouchy et de la présence de pirates (!) résidant sur ces terres, réunis en confrérie… Comme le souligne Le Routard, tout ce beau monde prend en effet la chose très au sérieux et il suffit pour en juger, de se rendre sur leur site web. Au passage, si un webdesigner vient à lire ces lignes, vous leur rendrez un grand service en leur proposant vos services: ce site web 1.0 mérite un lifting de toute urgence.

Le port d’Ouchy. (CC by Yoan)

Ouchy s’affiche également, en période estivale, comme «le rendez-vous des cols blancs et des touristes», selon Le Routard. Le Lonely Planet relève quant à lui les nombreux sports qui peuvent être pratiqués ici: roller, voile, pédalo, vélo, etc. Le guide australien rappelle également que c’est à Vidy que se trouve l’une des rares plages de sable du lac Léman.

Rick Steves souligne en outre combien l’environnement tient une place prépondérante à Lausanne, chiffres à l’appui: «l’écologie est populaire en ville, qui possède 300 m2 d’espace vert par habitant – plus que presque n’importe quelle ville en Europe.» Le bois de Sauvabelin, décrit par Le Routard comme «un poumon vert de 50 hectares», compte assurément pour beaucoup dans cette statistique.

Lausanne, une ville propre… mais chère

En guise de conclusion, abordons deux aspects essentiels qui font la réputation de la Suisse et qui sans grande surprise, transparaissent à la lecture des différents guides. Tout d’abord sa cherté, qui tend à provoquer une division des classes au sein de l’espèce homo touristicus. Rares sont en effet les occasions de croiser des backpackers en ville de Lausanne, et c’est évidemment fort dommage. Un extrait, provenant du Rick Steves, en l’occurrence sur l’offre culinaire à Lausanne, illustre à lui seul cette réalité: «La scène culinaire à Lausanne est décontractée, mais pas les prix des repas…».

Seconde caractéristique toute helvétique: la propreté. Le Routard, tout en relayant le témoignage de plusieurs touristes après leur séjour, apporte un constat difficilement réfutable: «Après le marché [de la Riponne], les étrangers sont toujours fascinés par les voitures balayeuses qui rendent les lieux propres en ordre” sitôt les stands levés; on est en Suisse ou pas!».


Ouvrages cités

  • Lonely Planet, 2018. Switzerland. Footscray : Lonely Planet. ISBN 9781786574695
  • Guide du Routard, 2013. Suisse. Paris : Hachette Tourisme. Le Routard. ISBN 9782012458055
  • Steves, Rick, 2018. Switzerland. Emeryville : Avalon Publishing. ISBN 9781631218248
  • Petit Futé, 2017. Suisse. Paris : les Nouvelles éditions de l‘Université. ISBN 9791033165385

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