Il est 22h, un homme arrive sur la scène, guitare à la main. Il s’approche du micro et lance : « Hi everybody, I’m Bastian Baker. Nice to see you. » Silence dans la salle. On pense que les gens n’ont pas compris, l’anglais permettant de faire passer n’importe quelle banalité pour un texte brillant mais qu’on ne saisit pas ; l’artiste le sait bien. Alors il réessaie, en suisse-allemand cette fois : « Salu z’same, ir bien dä Bastian Bakerrrrr ! Schön euh gsieh ! » Cette deuxième tentative, pourtant dans un bärndütsch parfaitement maîtrisé, plombera définitivement l’ambiance. Ultime essai en français, infructueux lui aussi. Le public se met à huer.
Ils ne l’avaient pas reconnu
Entre deux gobelets de bière lancés en direction de la scène, on comprend que les fans ne l’ont pas reconnu. Ils attendent l’arrivée de Bastian, le vrai, le beau, le prince charmant à la voix d’ange, l’ange à la voix de prince charmant. En face d’eux, l’homme tente de les apaiser : « C’est moi ! Je suis votre ami ! » Après quelques minutes chaotiques, les gens retrouvent leur calme et reconnaissent enfin le chanteur. Rassuré, il s’apprête à commencer à jouer mais les huées reprennent de plus belle.
Un col en V sinon rien
Les fans, en amateurs de musique avertis, réclament le traditionnel col en V blanc de leur idole. Or, ce dernier, lié contractuellement à la Poste, est obligé de porter, jusqu’au bout de la tournée, un col rond jaune, avec lignes grises sur les manches. Baker tente alors de négocier avec son manager, mais il est impossible de débloquer la situation. En effet, difficile de casser un contrat estimé à dix ans de salaire d’un postier moyen. Finalement, le chanteur doit quitter la scène pour des raisons de sécurité : certaines de ses groupies, en pleurs, commençaient à brûler l’album dans le but d’en faire des cocktails molotov.
Une fin de soirée difficile
Le Lausannois quitte la salle par la porte de derrière et file, sur son scooter Kyburz (modèle électrique à trois roues, autre obligation contractuelle) en direction de Lausanne.

Pensant se ressourcer parmi les siens, et en tripotant deux trois paires de fesses, il se dirigera en direction du Jagger’s, à la Rue Etraz. Mais, avec un t-shirt de la Poste, impossible de ramener des filles à la maison.
Espérons que le chanteur et son entourage communiqueront clairement à ce propos, afin d’éviter toute mésentente avec les fans. Quoiqu’il en soit, même si cela paie mieux de gratter des cordes que des textes, nous sommes parfois tous égaux face à la dure réalité de la vie.
(Image de Une : © Michael Dornbierer)
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