La littérature romande, ça vous inspire ? – « L’Enfant du placard »

La littérature romande, ça vous inspire ? – « L’Enfant du placard »

Après avoir parlé de bandes dessinées, de polars et de science fiction, il est temps de s'intéresser à un style véritablement littéraire. Mais n'ayez crainte, la littérature actuelle n'est pas forcément aussi déprimante que Balzac ou Maupassant, loin de là.
« Le prétendant fut accueilli à la porte par trois visages féminins, le premier semblait débordé, le deuxième ravi et le troisième suspicieux. » Jaquet, Tiffany. L’enfant du placard. Lausanne : Plaisir de lire, 2016. Collection Aujourd’hui. P.120

Résumé

D’un côté il y a Claire, en 2010, mère de deux jumelles adolescentes, divorcée et célibataire. A la mort de sa mère, elle va découvrir une lettre que celle-ci lui a adressée. A l’intérieur deux inconnus sont mentionnés: Enzo et Tatiana. Qui sont-ils ? Pourquoi sa mère ne lui en a jamais parlé auparavant ? Obnubilée par ces questions, Claire va partir à leur recherche et ce qu’elle va découvrir va chambouler toute sa vie. De l’autre côté, il y a l’histoire d’Enzo et Tatiana, deux immigrés italiens dans les années 60 qui tentent de s’installer en Suisse. Mais les choses ne sont pas simples pour les étrangers, la loi stipule qu’ils peuvent venir travailler neuf mois par années, puis ils doivent rentrer chez eux. Quant aux enfants ils ne sont tout simplement pas admis. Alors à la naissance de leur fille, Maria, Enzo et Tatiana vont devoir faire un choix qu’aucun parent ne voudrait avoir à faire.

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Ce qui se détache de cette lecture

« Claire se rappelait combien elle aimait voyager en train avec sa mère. C’était même la partie des vacances qu’elle préférait. Peu importe où elles se rendaient, du moment qu’elles y allaient en train. » Jaquet, Tiffany. L’enfant du placard. Lausanne : Plaisir de lire, 2016. Collection Aujourd’hui. P.161

Le roman traite principalement de l’immigration en Suisse des travailleurs Italiens dans les années 60. Il fallait du courage pour s’attaquer à un sujet de cet acabit, car il n’est pas toujours facile de revenir sur des épisodes sensibles de l’histoire de son pays. L’auteur arrive avec brio à nous faire entrer dans le quotidien et les espoirs de ce couple d’Italiens qui vient d’abord en Suisse pour travailler, puis tombe amoureux du pays et décide d’y construire leur avenir et celui de leur fillette. Aux travers des lignes, on découvre les difficultés de la vie des immigrés, les tensions qui commencent à apparaître au sein du pays, les propos xénophobes et les lois inflexibles concernant les étrangers. J’ai beaucoup aimé la manière dont le thème était abordé aux travers de ce récit. On entrevoit à la fois les perceptions de l’époque et celles que l’on en a aujourd’hui, avec le recul. J’avais déjà entendu parler des contrôles d’hygiène qui étaient de mise pour tous les immigrés, ainsi que les centaines de milliers (600’000 en 1970) de saisonniers qui ont traversés la frontière pour venir travailler chez nous, mais je n’en savais pas grand chose d’autre. Ce livre, bien qu’étant un roman de fiction, est une excellente manière d’en apprendre plus sur cette époque et la vie de ces gens. Cela nous permet également de nous questionner sur la réalité d’aujourd’hui. Je trouve que lire une histoire comme celle-ci remet bien plus en question notre conscience sur la politique d’immigration, que des affiches et des prospectus des différents partis, qui ne réussissent la plupart du temps qu’à nous exaspérer.

Un autre thème d’importance est celui de la famille, qu’on retrouve autant du côté de chez Claire, avec ses filles et sa mère, qu’avec Enzo, Tatiana et leur petite Maria. L’amour, le côté protecteur des parents, les sacrifices que l’on est prêt à faire pour les siens, les difficultés de faire comprendre l’injustice aux enfants, leur prise d’indépendance, tout y est. En clair, on retrouve au fil des pages tout ce qui fait la vie familiale. L’amitié n’est pour autant pas mise de côté, car sans le soutien et l’aide indéfectible qu’elle apporte dans les deux récits, la tournure des événements aurait été bien plus tragique.

Une bonne partie du roman se déroule à Lausanne, où Enzo, Tatiana et leur petite fille habitent. On retrouve entre autre des événements qui ont marqués la ville durant les années 60 comme la construction de l’autoroute Lausanne-Genève, ou l’Exposition Nationale de 1964.

Les pyramides de Vidy, construites à l’occasion de l’Expo 64. « La Suisse de demain vous invite aujourd’hui », slogan utilisé à l’époque et qui a fait rêver Tatiana et Enzo.

L’histoire est très belle, on y retrouve un côté dramatique non négligeable, mais aussi de l’humour, de l’entraide, de l’amitié, du courage, des soucis… Il s’agit d’une présentation de la vie au travers de ses joies et ses peines, rien de moins. La plume de l’auteure est agréable à lire, durant toute ma lecture je me suis demandée ce qui allait se passer, qu’était-il arrivé à Enzo et Tatiana ? Quand et comment Claire allait-elle découvrir la vérité ? Comment les deux histoires allaient-elles finalement se relier ? J’ai beaucoup aimé ce livre, qui m’avait d’ailleurs été chaudement recommandé. A mon tour de vous encourager à prendre le temps de vous y plonger.


L’écrivain

Tiffany Jaquet est une jeune enseignante de français et d’anglais. Originaire de Morges, elle a développé une passion pour l’écriture dès son enfance. L’Enfant du placard est son premier roman. Pour en savoir plus sur elle et l’écriture de son livre, découvrez dès demain le compte rendu de son interview !


La maison d’édition

Plaisir de Lire est une maison d’édition lausannoise fondée en 1923. Association à but non lucratif, son objectif consiste à publier des ouvrages d’auteurs de qualité, en lien avec la Suisse et s’adressant à un large public. Plaisir de Lire souhaite contribuer à la conservation et la mise en valeur du patrimoine littéraire. Cet éditeur a déjà publié les écrits d’une septantaine d’auteurs différents aux travers de ses trois collections : Patrimoine vivant, Aujourd’hui et Frisson.


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