Grill The Hill 2014 : Burn Motherfucker, Burn !

Grill The Hill 2014 : Burn Motherfucker, Burn !

Le week-end passé, la cinquième édition du Grill The Hill a plus que jamais fait vibrer les Pyramides de Vidy. Bière, métal, pluie et bonne humeur : compte-rendu de l'intérieur d'un blogueur passionné et bénévole enjoué.

grillcoverLa semaine est enfin finie. Ça fait des semaines que le bord du lac me manque. Relégué à mon insu dans un coin reculé de mon esprit, il n’attend qu’une bonne occasion pour revenir me hanter. Les pluies à répétition de ces derniers jours n’ont pas aidé à arranger cet éloignement, bien au contraire.

Mais quoi qu’il en soit, quoi qu’il arrive, je suis maintenant prêt à le rejoindre et à affronter ce cinquième Grill the Hill tant attendu, ces riffs sauvages, ces bières à foison, sa faune tatouée et son ambiance sans pareille.

Je ne me suis jamais senti aussi orphelin des soirées lausannoises cette année, depuis que Le Romandie a pris ses habituelles vacances estivales. Mais ne faisons pas d’amalgame, car même s’il partage le même amour de la fête, des musiques transgressives et du houblon, le Grill the Hill n’est pas Le Romandie. Le Grill the Hill se suffit bien assez à lui-même.

Après avoir croisé une dizaine de familles heureuses poussant poussettes et semblant s’éloigner des Pyramides de Vidy, j’arrive enfin à l’entrée du festival. Parfaite illustration de l’état d’esprit du Grill the Hill, les punks de la Place de l’Europe sont là aussi, posés sur l’herbe à faire rôtir leur merguez et autres cervelas, l’éternelle canette à la main. Puis, ce sont les basses qui me guident, les concerts ont déjà commencé et font déjà trembler les Pyramides. J’emprunte le petit sentier qui les traverse et me laisse doucement envahir par ce sentiment unique qui m’intime de laisser mes soucis à la porte et de ne plus trop penser.

© Lucien Caceres
© Lucien Caceres

Deux jolies bénévoles, tout sourire, m’accueillent sous un barnum fatigué, victime de la pluie de la veille. Mais avant toute chose, m’expliquent elles, je dois me rendre au stand merchandising où mon T-shirt staff me sera gracieusement remis. Car oui, comme l’année passée, je ne viens pas que pour les concerts, mais surtout pour participer à l’aventure Grill the Hill et aider ceux qui depuis cinq ans mettent toutes leurs tripes au service de ce festival. Et accessoirement pour faire couler la bière à flots !

C’est Anaïs qui tient le stand merchandising (également la responsable communication). Ses traits sont tirés et ses yeux marqués. « Plus le festival grandit, plus il faut mettre la main à la pâte et plus les nuits sont courtes. Mais putain, ça fait du bien d’être là ! » Anaïs fait partie de ce genre de personnes qui n’arrivent pas à baisser les bras et croient jusqu’au bout à leurs idées, à leurs projets. Je la connais depuis des années et je sais à quel point le Grill the Hill est important pour elle. Malgré la fatigue, ses yeux pétillent et me donnent une bonne dose de motivation. Puis comme d’habitude, elle me salue par mon nom de famille et s’occupe déjà d’un autre bénévole qui attendait derrière moi. L’instant « Tu te rappelles la fois où…» sera sûrement pour une prochaine fois.

21H. Bar 1. T-shirt noir vissé sur les épaules. Mon shift commence. Lydia, la responsable de bar, est à la tireuse et rien ne semble pouvoir l’arrêter, surtout pas les pintes qui disparaissent aussi vite qu’elle ne les remplit. Tout le monde s’affaire. Un concert vient de finir et une vague d’assoiffés se colle au comptoir. Pas de temps à perdre. Tenir un bar, c’est comme le vélo, ça ne s’oublie jamais.

Pendant 45 minutes, les verres s’enchaînent, les fûts diminuent à vue d’œil, les billets s’entassent et le sourire des gens grandit. Mon cerveau est en mode automatique et j’aime ça. Je n’ai que le temps de respirer et je ne suis pas le seul. Tous s’affairent autour de moi. Mais loin de nous l’idée que si on est ici, c’est surtout pour s’amuser. Les vannes commencent alors à fuser. Damien en devient l’expert et les reprend presque toutes à la volée. Saskia et Stéphanie, elles, essaient de couper court aux avances que certains festivaliers leur font et enchaînent les blondes, blanches et IPA aussi vite que n’importe quel vieux grigou de saloon.

background2014_HDL’effervescence fait son bonhomme de chemin. Derrière le bar, on se frôle, on se contorsionne et bien-sûr on se renverse de la bière dessus. L’une d’elles tombe presque intégralement sur mon short et je me fige. Stéphanie qui vient de me rentrer dedans s’excuse et devient sérieuse, mais mon rire soudain lui redonne aussitôt le sourire. On ne s’arrête pas pour si peu et la machine reprend. Un autre concert va bientôt commencer et on sent déjà la vague d’assoiffés diminuer. Du moins jusqu’à ce qu’une averse torrentielle s’abatte brutalement sur le Gril The Hill. Grosses gouttes ou grêlons ? Je n’arrive pas à décider. Ce qui est sûr, c’est que le bruit produit sur le toit du barnum assaille nos tympans comme jamais et que le devant du bar se retrouve à nouveau plein à craquer.

Heureusement, cela ne dure que cinq minutes et tout retourne vite dans l’ordre. Les festivaliers migrent sous le chapiteau et nous respirons mieux. Il est temps de faire la vaisselle, de préparer de nouvelles pintes, de se réapprovisionner en futs et de partager quelques parts de pizza revigorantes. Sans oublier le shot du staff, qui fait toujours figure de rituel sacré et qui, ce soir, m’incombe. C’est une première pour moi, fidèle amateur de bière de tous horizons, mais très peu de shot. Je me rappelle simplement que nous avons du rhum blanc et du sirop de canne et qu’il existe un lien entre les deux. Je ne sais plus lequel, mais tant pis, je tente. Le résultat est fort et sucré, exactement ce dont nous avions besoin maintenant. Je souris intérieurement.

© Gaspard Zoss
© Gaspard Zoss

Puis, la cadence diminue. Les discussions entre bénévoles commencent et les rires continuent. Je retrouve quelques amis perdus de vue, avec qui je cause brièvement (je les verrais sûrement après), avant de retourner tirer une autre bière pour un festivalier qui est loin d’être à sa première. Les futs de Punk IPA poussent d’ailleurs leur dernier souffle et la carte s’en retrouve tristement amputée. Heureusement, je me suis réservé une pinte de ce breuvage divin (Big up aux Écossais de Brew Dog) que je sirote de temps en temps, pour faire durer le plaisir. Mais, en pleine extase houblonnée, des touristes m’interrompent et me questionnent sur le Grill The Hill. Ils sont tombés là par hasard, simplement guidés par la réputation de notre bord du lac et leur curiosité. Je leur explique alors avec plaisir l’histoire du festival et son concept (que vous pouvez retrouver ici, dans notre article de l’année passée). Ils ont l’air ravi d’apprendre tout ça et me commande trois bières, avant de se diriger sous le chapiteau. Grand bien leur fasse !

La soirée continue comme ça. D’autres vagues succèdent aux accalmies et la fin du shift arrive beaucoup plus vite que prévu. Le temps s’est raccourci lors de ces trois dernières heures. Je me ressers une pinte, salue mes collègues d’un soir et m’en vais savourer ma bière face au lac, sur les rochers. Les lumières d’Evian brillent plus que jamais. Je me sens privilégié d’avoir pu être là ce soir, d’avoir fait partie de ce cinquième Grill The Hill, d’avoir participé à la bonne humeur et aux rires des gens qui m’entourent. C’est un sentiment rare et tellement puissant.

© Alexandre Dell'Olivo
© Alexandre Dell’Olivo

Mais, Janko interrompt mes rêveries et me salue passionnément de sa main calleuse. Ça doit bien faire deux ans que je ne l’ai pas vu et ça me fait énormément plaisir de le revoir ici. Nous discutons une bonne heure, avant que je croise une amie motivée qui m’entraîne pour le dernier concert du festival, celui de Labrats Bugband, un groupe de Hip-Hop bien rageur et bien local. Et vu que le rap est plus ma came que le métal, je bounce lourdement ma tête avec plaisir et essaie de comprendre ce qu’ils disent dans leurs micros saturés. Puis, le concert se finit et ma tête résonne encore pendant bien dix minutes. Je passe alors devant des peintures murales étranges mais magnifiques, faites sûrement pour l’occasion (par Loïc Lebas) et représentant des humanoïdes gris et déshumanisés. Ces images me calment.

Puis, on me présente alors Sara, une amie d’amie, et il est trop tard. Sara de Bob Dylan envahit mon esprit plus vite que n’importe quelle drogue (Sara, Sara, So easy to look at, So hard to define) et elle m’accompagnera tout le reste de la soirée, qui est loin d’être finie.

Alors merci Grill The Hill, merci Anaïs et merci Lausanne, ton univers impitoyable et ta beauté infinie.
See you next summer Grill The Hill !

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Image de couverture © Gaspard Zoss

Lyrics Sara © Bob Dylan 1975/Ram’s Horn Music 1976  (renewed 2003/2004)

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