Foucault : La prison aujourd’hui.  Prison, l’intolérable hier et aujourd’hui.

Foucault : La prison aujourd’hui. Prison, l’intolérable hier et aujourd’hui.

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Du 19 mars au 30 mars, le groupe Info prison coordonne un événement majeur lié à la thématique de la prison en Suisse romande. Plusieurs associations concernées par cette problématique vous proposent divers événements pour tenter d’y réfléchir.

affiche_foucaultJ’ai eu le plaisir de rencontrer Muriel Testuz et Juliette Gerber, qui font partie du projet « Foucault : La prison aujourd’hui ».

Muriel Testuz fait partie d’Info prison et Juliette est la coordinatrice de l’association Prélude qui participe à l’événement.

Muriel tient à revenir un peu sur l’histoire du groupe Info prison, à l’origine du projet. Le groupe s’est créé à la suite du décès du détenu Skander Vogt en 2010. Il est constitué de personnes qui étaient déjà engagées dans la thématique « prison » dans les années 80, dont Anne-Catherine Menétrey ou Marie Bonnard ayant fait le constat que, contrairement aux années 70 ou 80, il n’y avait plus de groupe qui réfléchissait à ces thèmes dans la société civile et qui pouvait avoir un rôle de surveillance, personne pour reprendre ce rôle de façon frontale. Ils ont donc décidé de créer ce groupe pour réfléchir, rendre visible cette problématique mais plus pour s’engager de manière militante.

Au printemps 2012, la pièce « Foucault 71 » qui met en scène l’engagement de Foucault est jouée à Genève. Muriel est intéressée à la faire venir à Lausanne. Pour elle, cette pièce nous rappelle l’indignation et l’errance de l’époque, c’est une « fenêtre ouverte sur le passé pour questionner le présent ». Elle réussit à programmer la pièce à la Grange de Dorigny. De là, Info prison décide de faire un appel large aux associations, aux personnes concernées par la thématique « prison » pour voir ce qui pouvait en sortir. C’était il y a quelques mois et les associations ont répondu présentes ! Chacune s’est engagée à faire un événement lié au thème et à sa spécificité.

Juliette, qui a répondu à l’appel avec l’association Prélude, me dit que c’est bien là le point intéressant : l’événement propose de voir les différentes facettes de la thématique. Info prison a joué le rôle de coordination, les autres ont été des partenaires jouant des rôles importants quant à la réflexion sur la prison.

Il y a trois projets portés par Info prison dont la soirée d’ouverture, en présence de Michel Porret, qui passe le film « Moi, Pierre Rivière ayant égorgé ma mère, ma sœur et mon frère ». Ce film de 1976 raconte l’histoire vraie de cet homme qui avait tué sa famille en 1835. Epargné de peine de mort, il a écrit sous demande d’un juge comment il se voyait responsable de ces terribles meurtres. C’est une réflexion autour de la justice et de la psychiatrie à laquelle Foucault, lors d’un de ses séminaires, va s’intéresser de près.

Le GRAAP (Groupe romand d’accueil et d’action psychiatrique) organise aussi une soirée autour de la thématique psychiatrique en se rappelant que des malades psychiques sont emprisonnés sans avoir commis de graves délits mais sans date de libération non plus.

L’Òblo projette l’unique documentaire qui compile des conférences et présente des concepts clés de Foucault.

La quasi-totalité de la programmation est ancrée dans la réalité, une seule œuvre de fiction, « Un chant d’amour », film qui a été interdit pendant 25 ans et qui parle de l’enfermement dans l’imaginaire des personnes incarcérées sera projetée dans le cadre du projet.

Muriel me donne un scoop, en me disant qu’il y a aussi un événement un peu en marge et qui n’est pas annoncé dans le programme officiel et qui se déroule à l’espace autogéré autour de l’abolitionnisme.

Ensuite, Juliette me parle des événements que Prélude organise au théâtre 2.21 du 27 au 30 mars prochain. Ils ont invités d’autres associations françaises à se joindre aux projets. Ils prévoient des projections issues de la création partagée, qui consiste à rassembler des professionnels et des non professionnels, est le thème de leurs journées au 2.21. C’est un idéal en question pour l’association Prélude qui fonctionne souvent dans ce type de projets. «  C’est la 2ème fois que Prélude fait un temps d’arrêt et de réflexion globale depuis sa création en 2006 » me dit Juliette. Evidemment, ils ont des réflexions autour des projets qu’ils mettent en place, mais ce week-end sera l’occasion de s’arrêter un peu et de penser.

Par ailleurs, le dimanche, aura lieu une table ronde avec trois intervenants. Mathieu Menghini, Delphine Horst qui a déjà travaillé avec Prélude et Marco Schlechten qui est animateur socio-culturel aux EPO (établissement de la plaine de l’Orbe). Cette table ronde invite aussi le public à la discussion.

Sinon, durant les quatre jours, différentes expositions sont présentes au 2.21. Exposition de photographies mais aussi sonore, l’association Prélude ayanat aussi le plaisir de vernir un CD : « On vous parle de la prison », issu de l’un de ces projets qui a permis à des détenus de créer des musiques lors de leur passage en prison, même s’ils n’étaient pas musiciens. Il y aura d’ailleurs aussi un concert lié à ce projet au 2.21. Puis le dimanche, il y aura aussi la verrée de clôture au 2.21 avec Info prison pour finir en beauté ce bel événement, une première en Suisse d’après Muriel.

Intéressée par cette thématique et lancée dans cette belle discussion avec mes deux interlocutrices, je leur demande pourquoi il n’apparait pas dans leur programme une place pour les personnes qui ont été en prison. Pour Muriel, actuellement, il n’y a plus, ou moins, de militants en prison qui sont prêts une fois dehors à faire entendre leur voix. Elle rappelle que lors de la soirée du GRAAP, il y aura quand même des personnes qui ont été incarcérées.

Juliette me donne le même son de cloche en racontant que parfois l’association Prélude essaie de garder des liens ou de simplement recontacter les personnes après leur sortie, mais cela s’avère en général très difficile pour toutes sortes de raisons.

Elles me rappellent enfin qu’être « prisonnier » est un statut administratif uniquement mais ne correspond pas à une identité : «  Ce n’est pas juste parce qu’on est allé en prison qu’on a quelque chose à en dire ». Et Muriel continue : «  et finalement qui peut parler au nom de qui ? »

Toutes deux me disent que ce temps de réflexion est nécessaire et que cette thématique semble revenir sur le devant de la scène médiatique. Si vous aussi elle vous intéresse, je vous conseille vivement d’aller un peu fouiller le programme de cette manifestation qui compte de nombreux événements (films, court métrage, débat, conférence, théâtre,…) répartis sur une dizaine de jours.

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