Federer: Le nouveau Guillaume Tell

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C'est l'histoire d'un Suisse que l'on mit un jour au défi de devenir la plus grande légende du tennis de tous les temps. L'histoire d'un compatriote qui nous rend tous les jours un peu meilleurs par sa simplicité et son humanité. Un bol d'air frais pour notre pays.

Le peuple Suisse n’a-t-il jamais soutenu aussi ardemment un de ses champions ? Dimanche dernier, la Suisse tout entière n’avait qu’un seul nom en tête : Roger Federer. Ce nom qui dorénavant  sonnera dans nos oreilles comme celui d’un héros grec. Le Suisse, que l’on a mis au défi de dépasser les plus grandes légendes du tennis, a réussi son Pari(s). Ce bougre finirait-il par nous faire croire au destin ? Vainqueur de Roland Garros et de quatorze tournois du Grand Chelem, il est considéré par ses pères comme le plus grand joueur de tennis de tous les temps. Mais a-t-il en tête, Roger Federer, l’extraordinaire popularité dont il est l’objet ? Sait-il que devant les caméras du monde entier, quand il pleure c’est tout un pays qui pleure ? Le sport n’est jamais aussi vivant que lorsque l’on peut s’identifier à ses champions. Ce n’est pas lui qui court sur le terrain. C’est tout un peuple qui rattrape cette volée, qui manque ce passing, qui soulève la coupe. Alors on ne se lasse pas de rappeler au monde entier que ce prodige de la petite balle jaune a grandi dans notre pays dont la petitesse n’a d’égal que la grandeur de l’œuvre du tenissman. « Vous connaissez Roger Federer ? » « Oui, bien sûr. Il habite chez moi, en Suisse ». Alors dimanche, devant mon poste, j’ai un peu mieux compris ce que ça veut dire de se sentir Suisse.

 

Ma maîtresse d’histoire de sixième, un beau matin, enivré par un sentiment nationaliste que nous ne lui connaissions pas mes camarades et moi, se mit en tête de nous faire croire que la Suisse ne faisait qu’un. Dur métier. « (…) c’est alors que le bailli sous peine de mise à mort lui ordonna de percer à l’aide de son arbalète une pomme posée sur la tête de son fils. Sans même suer une seule goûte, Guillaume Tell transperça la pomme dans un geste à la fois limpide et héroïque. A partir de ce jour précis, les cantons suisses se réunirent dans l’idée de se défendre contre l’ennemi commun. La Suisse ne faisait qu’un et bla bla bla…». Vingt minutes plus tard, à la récréation, Hans, le Schwitzois fraîchement débarqué dans notre classe, se prenait une tarte dans la gueule avant de se faire écraser son goûter dans le nez en raison de son accent trop prononcé. « Elle est belle la Suisse » me dis-je alors.

Pas découragé, j’envisage de comprendre. Qu’est-ce qui se passe ? Pourquoi mon pays ne déchaîne en moi aucune passion ? Je finis par saisir qu’au-delà d’une montagne et d’une friandise, la Suisse n’a rien en commun. Ni sa langue, ni sa culture, ni même sa conscience. Des bouts de territoires collés ensemble à la glue institutionnelle.

La solution était toute trouvée : il nous faut un nouveau Guillaume Tell. Un mec capable de trouer une fesse à cent mètres. Et puis « oh miracle » le petit « Rodgeur » naquît. De tournoi en tournoi, sa précision augmentait. En 2003, début du sacre avec une victoire à Wimbledon. Les années se suivent et se ressemblent. En 2005, il remporte 95.3% de ses matchs dont deux nouveaux tournois du Grand Chelem. En 2006, le Suisse atteint les finales de tous les Grands Chelems et ne laisse échapper que celle qui lui manque à cette époque : Paris. Après 237 semaines de règne sans partage sur le monde du tennis, « Rodgeur » perd sa place de numéro 1 mondial en 2008. Ce jour-ci, la Suisse a connu une journée de deuil national. Comme si un bien précieux de son patrimoine lui avait été volé.

Mais dimanche 07 juin 2009, Federer gagne le seul tournoi qui lui manque et devient le tennisman le plus important de l’histoire. Un coup droit qui restera à jamais dans nos mémoires. En quart de finale alors que notre idole joue contre Tommy Haas, le Suisse est à la dérive. Balle de break contre lui dans le troisième set qui pourrait lui être fatale. Le court central est silencieux et la tension est palpable. Comme pour me préparer au pire je préfère ne plus y croire. Dans l’échange, le Bâlois est débordé. Derrière chaque poste de télévision, derrière chaque regard, une interrogation : comment peut-il s’en sortir. Obligé de se sortir du court, le Suisse contourne son coup droit est frappe la balle de tout son poids. La sphère de tissu jaune vient s’écraser sur la ligne de l’autre côté du terrain. La Suisse n’est pas morte. Tout un peuple respire. Guillaume tell est ressuscité.

Thomas

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