Dans l’imaginaire collectif, le quidam (du secteur tertiaire) se rend dans un bureau lorsqu’il va au travail. Depuis quelques années maintenant, ce n’est plus la machine à écrire sur laquelle il tapote, ni le dossier physique qu’il ouvre. En 2016, on peut faire son taf partout. Surtout s’il y a un signal wifi et une prise électrique à proximité.
Travail connecté / déconnecté
Le 21ième siècle, grâce ou à cause d’Internet, voit la frontière entre le travail et la vie privée disparaitre. Justement car on est relié à tout, tout le temps. Sur mon téléphone portable, je peux lire mes mails du boulot, mais je suis aussi à un seul clic de lire un article du LBB au travail. En parlant du blog, une autre question surgit : si mon investissement est bénévole, est-ce que je ne travaille pas en rédigeant des articles ? Je ne suis pas rémunérée mais j’y investis du temps et j’ai aussi besoin d’un équipement, toujours le même : électricité, Internet et ordi. J’écris souvent sur ma vieille bécane, posée sur un coin de table pas très confortable. La même machine sur laquelle j’ai tapé mon travail de master, arpentant les bibliothèques parce qu’elles m’offraient une concentration plus soutenue, même si je me sentais parfois un peu seule.
Grégaire
Parce que le travail ou les études, en réalité, sont souvent peuplés de semblables que l’ont peut retrouver régulièrement. Des collègues qui bossent dans ta boite, des étudiants qui révisent en même temps. Tu croises un tel près de la machine à café, échanges sur la pluie et le beau temps, pestes sur la nouvelle directive machin. Tu lui parles d’une idée que tu as eue en regardant la conférence TEDxInnovatorz, il te donne une tape sur l’épaule en forme de conseil. Dans le lieu physique du travail, il y a de l’émulation qui améliore la qualité de vie et parfois aussi la qualité du travail. Même si tu dois te taper les blagues relou de Jean-Pierre, tu sais que Cécile te donnera toujours de quoi rebondir lors des coups de mou.
« Quand je viens à l’eclau, je mets pas juste un t-shirt »
Cet esprit, c’est ce qu’a voulu recréer Stephanie Booth, avec l’eclau, un espace de coworking pour les travailleurs indépendants. Ces gens qui n’ont pas d’horaires imposés par la hiérarchie, qui font leur petit bonhomme de chemin comme des entrepreneurs pour satisfaire leur client, mais qui n’ont pas forcément de pairs, car ils sont tout seuls pour travailler. Ils pourraient le faire depuis chez eux, moyennant une chaise confortable en sus des pré-requis précités. Ce qu’ils cherchent, c’est le contact. Pouvoir se battre pour le four à micro-onde à la pause de midi et discuter autour d’une table commune. En me rendant sur place, j’ai également perçu une autre raison sous-jacente : donner de la structure à son investissement au travail est aussi important. Ainsi, en venant à l’eclau, on crée une frontière entre la maison et le travail, et en rentrant à la maison, on laisse (un peu) le travail à l’eclau. C’est aussi symbolique : « quand je viens à l’eclau, je mets pas juste un t-shirt » dit d’ailleurs un des membres actuels.
Communauté VS business center
Premier espace de coworking qui en porte le nom en Suisse, l’eclau a été ouvert en 2008 (les 8 ans seront fêtés le 3 novembre) pour répondre à une envie de Stéphanie. Le besoin de créer une différenciation entre le domicile et le lieu de travail se faisait sentir, mais il a fallu un peu de temps pour trouver une surface pour installer les bureaux. Stéphanie a rassemblé le nécessaire pour créer plusieurs places de travail. Elle se charge de la maintenance et elle est responsable du lieu, financièrement aussi.
A l’eclau, pas de bling bling. L’idée est de retrouver une communauté, plutôt stable, qui s’investit. « Il y a d’autres endroits super design où le loyer est plus cher, mais ce n’est pas le même public ». Si on sait que certains géants actuels du web ont commencé dans un garage, l’eclau c’est plutôt un esprit « colloc bohème ».
Lausanne indie
En parlant d’état d’esprit, je profite de ma discussion avec Stephanie pour lui demander ce que veut dire « être indépendant » en Suisse, si tant est qu’il y ait des différences. Dans mon imaginaire, il doit sûrement exister des villes plus propices que Lausanne ou les autres villes suisses pour se lancer seul dans une aventure professionnelle. « Ce qui caractérise les indépendants, c’est la prise de risque. C’est de pouvoir dormir quand ton compte est à découvert le 5 du mois et que tu sais pas quand tu auras un autre mandat ». Effectivement, en Suisse, il n’est pas certain que ce trait de personnalité-là soit courant. Pour les intéressés, l’eclau peut éventuellement faire office de refuge.
Pour connaitre les autres espaces de coworking à Lausanne : un article d’un autre blog de la place, Une Chouquette à Lausanne, résume bien la situation.
Le LBB était déjà allé en visite à l’eclau, y a 7 ans : flashback
Image de couverture : L’eclau dans sa lumière naturelle. CC_by Stephanie Booth
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