Deklin au pays du Levant

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Neuf jours de tournée, cinq concerts, quatre pays francophones représentés musicalement et un milliard de Chinois, qu'est ce que ça donne? Le rappeur lausannois Deklin est aujourd'hui en mesure de résoudre cette équation des plus inattendues.

Respirant et transpirant le hip-hop depuis son plus jeune âge, le MC lausannois Deklin, Kevin Melchior de son petit nom, jouit d’une certaine réputation (doublée du talent qui va avec) dans le milieu underground du rap romand. Malgré cela, les places pour la grande et étincelante notoriété musicale au niveau fédéral, voire international pour certains, ne sont pas nombreuses et surtout squattées par les mêmes pour un bout de temps, semble-t-il (pas de jugement de valeur dans cette fin de phrase). Pour Deklin, les concerts débridés de fanatiques scandant son blase en vomissant leurs entrailles sous le coup de l’émotion ne sont pas légions, et, soyons franc, il s’en tape. Pourtant, quand il fut sélectionné par l’alliance française, grâce à sa présence sur une compile de la FCMA, pour représenter la Suisse à la Fête de la Francophonie, organisée en Chine cette année, le rappeur de 26 ans était loin de se douter que le statut de superstar (mot qu’il exècre) serait momentanément sien du 14 au 23 mars 2009, le faisant vivre une épopée que même les artistes romands les plus no-no-no-notorious n’ont sans doute jamais vécue.

Les tribulations d’un d’chez toi en Chine

Accompagné de ses comparses Keko (MC), Séki (DJ), et Luthor au beatbox, Deklin aura tourné en tout et pour tout neuf jours dans l’Empire, avec un budget lui permettant d’assurer cinq dates sur la vingtaine proposée par l’événement: Chongqing, Canton, Chengdu et une doublette à Beijing. A chaque fois, l’émeute, au propre comme au figuré.

L’émeute pour un occidental en Chine, en premier lieu. Quand on est caucasien et qu’on se trimballe avec un beatboxer chauve de deux mètres dans un supermarché, encerclés par une ribambelle de petits Chinois, tantôt hilares, tantôt ébahis devant un tel spectacle, on sent déjà qu’il se passe quelque chose. Selon Deklin, on comprendrait mieux pourquoi E.T. ne la ramène pas trop dans le film de Spielberg.

Dans un second temps, l’émeute pour un artiste qui ne s’attend pas à ce qu’on l’attende. Des files de plusieurs centaines de mètres faisant le tour de bâtiments gigantesques, des salles combles à chaque date, remplies à craquer par un public à 80% féminin, hurlant, martelant les vitres les séparant du passage des artistes. Tout un monstrueux bordel engendré par un peuple pourtant si discipliné en dehors de la fête. Sur scène, une gigantesque bâche portant le logo de l’événement ainsi que les visages des protagonistes en surimpression, dans le même style que les affiches, placardées dans toute la ville avec le nom “Deklin” rockstarifié sur papier glacé. “Quand tu vois un auditoire remplis de mecs qui portent des lunettes en carton avec ta gueule dessus, je peux te dire que tu comprends pas vraiment ce qui se passe…” Tu m’étonnes, mon pote! “Une séance d’autographes de plus d’une heure, après un interview,  m’a fait comprendre que j’étais pas fait pour ça!” L’anecdote la plus énorme de la tournée reste le moment où Deklin a dû enregistrer un petit spot pour la télévision sur le modèle “Hey yo, I’m 50 Cent and I’ll see ya at the NRJ Music Awards!” De la fiction. Mais pourquoi cet engouement pour quelqu’un qu’on ne connaît pas? Selon le MC, dés qu’un artiste occidental fait le déplacement, c’est qu’il en vaut la peine. La capacité d’information des Chinois est si faible, avec par exemple l’interdiction récente de Youtube, que tout musicien étranger déchaîne les passions.

Enfin, l’émeute pour un artiste underground dans un pays qui n’en connaît quasiment pas. Caméras de surveillance sur scène, couvre-feu par endroits, censure, sanctions… Certains rappeurs chinois croisés par Deklin étaient techniquement très hésitants et les conversations de puristes inexistantes. Pour être underground en Chine, il faut l’être au sens strict: caché, en dessous du sol et à l’abri des contrôles. Séki, resté en Chine une semaine de plus que Deklin, aura néanmoins pu rencontrer des artistes underground chinois purs et durs.

What are you up to, Dekline?

Petit coup de promo au héros de cette histoire, qu’on lui souhaite de revivre (d’une façon moindre) un jour chez nous, en vous parlant de son album  “Lignes de vie”, sorti en 2007 et de plusieurs opus sur lesquels il figurera très prochainement, dont une mixtape dans laquelle les représentants français (Fisto et N.E.M.O.) et québecois (Accrophone) de la Fête de la Francophonie pourraient bien faire une apparition à ses côtés. Il fait également partie des prochaines sorties de DJ Vincz Lee (Downtown Boogie), Sisma, ainsi que de l’album Orjazzm de Kronos et Rize (qui fera l’objet d’un post très bientôt). Enfin, il est déjà présent sur le dernier album du groupe Melting, la dernière Mixtape de ProtonProd. et l’album “le Langage des Cygnes” de Pharaon Prod, chez Sick Swan Records. A noter que vous pouvez aussi l’écouter et suivre toute son actualité sur sa page MySpace (http://www.myspace.com/deklinfeelin), et, si le coeur vous en dit, rejoindre son groupe Facebook en tapant Deklin dans votre FaceMoteur de recherche.

Pour en savoir plus sur la Fête de la Francophonie, vous pouvez consulter ce lien: http://www.ambafrance-cn.org/Fete-de-la-Francophonie-2009.html?lang=fr .

Yann Marguet

Yann Marguet

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