Berlusconi tape sur les expatriés italiens – le retour

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Après les coupes sur l'éducation et la culture dans le budget des Italiens de l'étranger, cette fois ce sont les anciens qui ne décolèrent pas face à la réforme financière voulue par le gouvernement italien.

“Nous sommes des résidents de série B…”. Sans jeux de mots crapuleux, aux antipodes d’une allusion népotiste au Cavaliere, le constat d’Umberto Angrisani fait soupirer les personnes dans la salle. La vingtaine de visages, marqués par les années, a les yeux fixés sur le représentant de l’INAS (Institut National d’Assistance Sociale) pour le canton de Vaud.

Mercredi, plusieurs représentants du patronat italien en Suisse, ainsi que quelques retraités compatriotes se sont retrouvés au Consulat d’Italie pour protester contre la réforme financière, prévue d’entrer en vigueur le 1er janvier 2009. Mercredi 10 décembre, journée des Droits de l’Homme. C’est aussi une journée de mobilisation internationale des retraités, dont les délégations se sont rassemblées dans les consulats et ambassades du monde entier pour manifester leur mécontentement. Si elle promet de couper drastiquement dans le budget sur l’éducation et la culture des expatriés dans le monde, la dernière trouvaille monétaire de Sivlio Berlusconi fera également mal pour les bourses des anciens. 

– 43’406’088 euros. Ni plus ni moins. C’est le montant total de la coupe budgétaire prévue au 1er janvier 2009, qui passe ainsi de 78’139’177 euros pour 2008 à 34’733’089 pour l’année à venir. Autant dire que le choc est brutal. Rien que pour l’assistance sociale aux retraités, cela signifie une amputation de plus de la moitié des fonds (de 30’774 euros à 11’777’047 euros). Autrement dit, partager en quinze une tarte qui peine déjà à nourrir six bouches. Tchak! La guillotine tranche sec dans le pecorino. Sans huile d’olive, aperitivo, tomates séchées ni bruschette…

Les Italiens de Suisse, premiers touchés

Parmi les revendications des syndicats qui défendent les intérêts des retraités italiens, deux points concernent tout particulièrement les expatriés en Suisse. Tout d’abord, la pension sociale pour ceux qui souhaitent rentrer au pays. En août dernier, Rome “impose l’obligation de dix ans de résidence continue sur sol national pour avoir droit à la pension sociale.” En d’autre termes, un Italien qui décide, à 65 ans, de s’installer dans son village natal, devra attendre son 75ème anniversaire pour toucher son pécule. Sans vouloir peindre le diable sur la muraille, comment une personne de revenu modeste, qui peine déjà à joindre les deux bouts en Suisse, pourra-t-elle espérer s’en sortir pendant dix ans dans un pays – l’Italie – qui voit les prix exploser et qui lui refuse l’aide auquel il a droit, durant dix ans? Comment fera-t-elle si elle ne possède plus d’appuis locaux, comment fera-t-elle si sa famille souhaite “faire le pas” et la suivre dans le rapatriement? L’Italie n’est-elle accessible qu’aux Italiens qui ont fait fortune à l’étranger, pas aux autres? Le hic avec un petit “h”, est que cette mesure hypothèque sérieusement les possibilités de retour pour des expatriés qui ont, suivant les cas, passé plus de 40 ou 50 ans ici. Le Hic avec un grand “H” cette fois, est qu’elle instaure une discrimination entre riches et pauvres, revenus aisés et revenus plus faibles, là où il ne devrait pas y en avoir. Toujours une histoire de pognon, Silvio.

Ensuite, l’ICI. Trois lettres que certains aimeraient bien voir disparaître pour de bon. On aurait pu y croire. En juillet, le gouvernement italien abolit l’Impôt Communal sur les biens Immobiliers, pour tous les propriétaires de maisons en Italie. Revers de la médaille: tous, excepté les Italiens résidant à l’étranger. Curieux. Non seulement les Italiens qui vivent et travaillent en Suisse sont les seuls à être taxés sur le bien immobilier qu’ils ont réussi, au fil des ans, à se constituer (en plus des impôts helvétiques, double coup de poing), mais surtout, le gouvernement pense économiser en abolissant l’impôt sur les villas et palaces de certains politiciens, magnats de la finance, entrepreneurs fortunés et mafieux enfarinés…. en taxant le travailleur modeste, expatrié depuis un demi-siècle. Manichéenne s’il en est, cette situation garde son fond de vérité.

Quoi qu’il en soit, Monsieur Berlusconi, voilà des questions auxquelles vos rides chirurgicalement botoxées, votre sourire de clown et vos implants capillaires gominés auront bien de la peine à répondre ou trouver justification.

Rome fait la sourde oreille

“Les retraités et les Italiens du monde demandent sérieux et respect de la part de leur gouvernement.” Rien de tiré par les cheveux, si j’ose la transition avec le capilotractisme poussif du Cavaliere. Adolfo Barattolo, le Consul général d’Italie, est compréhensif. Il écoute attentivement, acquiese et conseille. Lui ne peut pas faire grand chose, à part transmettre le grief des manifestants plus haut, à Rome. “Je m’unis à vos difficultés, d’autant plus que la réforme fiscale touchera également les services consulaires dans le monde, avec des réductions d’effectifs importantes. La tendance des deux derniers gouvernements est dommageable, à plusieurs niveaux.” Que cela soit clair, les représentants des intérêts des rétraités italiens présents ne demandent pas que la réforme fiscale soit abolie. Face à la crise économique, qui frappe l’Italie de plein fouet, des coupes sont nécessaires. “Nous voulons seulement que des contrôles soient effectués afin de déterminer s’il ne serait pas plus pertinent de tailler ailleurs que dans l’éducation et l’assistance sociale”, explique Grazia Tredanari, présidente du COM.IT.ES. Vaud.

Le Consul reste pessimiste, “il n’y a malheureusement aucune possibilité de changements. La crise est trop forte et la réforme fiscale entrera en vigueur le 1er janvier.” Lueur d’espoir dans la tempête: selon monsieur Barattolo, le secteur de l’éducation pourrait être quelque peu préservé. “Pour autant que les autorités helvétiques nous soutiennent, ne serait-ce qu’au niveau organisationnel, pour le maintien des cours d’italien.” L’école italienne n’est pas reconnue par les cursus scolaires officiels, alors même que l’Italien est une langue nationale. “D’une certaine manière, l’Italie contribue à former les citoyens suisses de demain, les doubles nationaux italo-suisses notamment, qui sont une plus value certaine pour la Confédération. Dans ces conditions, un appui de se part serait loin d’être malvenu.”

…qu’on ne l’oublie pas: avec sérieux et respect. Tout est dit.

Michael De Pasquale

Michael

3 Responses

  1. Avatar
    mbsee
    | Répondre

    voilà, italiens résidents à l’étranger, vous n’avez pas voté pour LUI l’autre fois.
    et il ne vous le pardonne pas, il est rancunier le m’sieu….

  2. Avatar
    michele
    | Répondre

    Ahi!Ahi! Ca fait mal. Berlusconi n’a toujours pas avalé sa chute d’ il y a bientôt 3 ans justement à cause du vote des Italiens de l’étranger. Il se montre tel qu’il est: rancunier comme un enfant. Quant à la réaction de la communauté italienne, elle est bien trop molle et trop divisée  pour arrêter la fureur du Berlusca. Bientôt ce sera au tour du réseau consulaire. Ahi! 

    • Avatar
      Corentin
      | Répondre

      Etrange, ici de ce côté des alpes c’est la décision inverse qui a été prise… gratuité des frais de scolarité des écoles françaises à l’étranger, progressivement mise en place. Et de même, inversement, pour flatter un électorat expatrié déjà bien acquis à la cause conservatrice en france!!
      et bien que l’option choisie soit inverse à celle de berlu, les conséquences sont tout aussi scandaleuses..

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