Violences domestiques et permis B : le choix kafkaïen des femmes migrantes

Posté dans : Société 2
Face aux violences conjugales, les Suisses ne sont pas toutes égales. Une d'entre elles au bénéfice de la régularisation, permise par le biais de son mariage, se verra la perdre en cas de rupture, de divorce ou de violences conjugales. Notre bloggeuse au permis B s’interroge.

C’est non sans un grand intérêt que  dans l’émission “Que de la Radio” du mardi 12 mai dernier sur Couleur 3, j’ai pu écouter l’histoire d’une Madame Douno. Face aux violences conjugales subies par son mari, celle-ci s’est vu retirer son permis B. Un témoignage aussi troublant que répandu. Car si l’on reçoit nos papiers par le mariage, une fois celui-ci rompu pour X raisons, le droit aux papiers n’existe plus. Ceci, même en cas de décès du conjoint suisse ou européen, tout comme en cas de violences conjugales. Et qui plus est, même si l’on est en Suisse depuis des années.

L’histoire de cette femme, Genet Douno, est aussi complexe que banale. D’origine éthiopienne, venue en Suisse en 2000 en tant que requérante d’asile, elle retire sa demande d’asile à la suite de son mariage conclu avec un ressortissant suisse. Une union d’amour qui se dégrade. Suite aux violences répétitives infligées par son mari, elle le quitte. Non sans conséquences. Une séparation et exit son permis B. L’histoire est peut-être banale, mais elle est tout aussi complexe si l’on s’intéresse aux conséquences futures d’une décision privée. Pour Genet Douno, le choix est vite fait. Rester en Suisse et se faire battre. Faire ses bagages et retourner dans les terres qui l’ont vu fuir. Et ce, compte tenu du retrait de la demande d’asile et du risque d’incarcération ainsi que des violences subies dans son pays d’origine. 

Pour la plupart des femmes, sortir d’une relation violente relève d’un parcours du combattant. Pour une femme affaiblie psychologiquement depuis des années, s’arracher de l’emprise d’un homme est encore plus difficile. Mais elle, Genet Douno l’a fait. De retour, on lui demande gentiment de quitter la Suisse. La jeune femme n’est pas fautive pour autant.  

Face à la situation, le collectif Sorcières en colère se bat pour la régularisation de Mme Duono. La loi dont dépend son cas, le LSEE, a été remplacée depuis début 2008 par le LEtr. Les possibilités de recours sous l’ancienne loi épuisées, un rendez-vous de soutien a eu lieu le 12 mai, au  Grand Conseil. Le but? Réexaminer le cas par un ultime recours sous la LEtr. 

Malheureusement, Madame Douno est loin d’être un cas unique en Suisse. Sa situation soulève bien des questions et autant de réflexions sur les mariages mixtes et les flux migratoires. Comment est-ce que l’on peut garder le droit à une vie privée et le libre-arbitre dans notre vie conjugale si l’on sait que l’on risque de se faire renvoyer dans notre pays d’origine. Cette dépendance juridique change les enjeux du pouvoir chez les étrangers (qui doit peser ses décisions et actions en fonction de ses papiers), mais aussi au sein du couple. Mme Douno en a dit autant: son ex-mari était conscient de cette dépendance pour lui aux yeux de la loi, et en abusait pour la manipuler. 

Qu’est-ce que Mme Douno peut nous apprendre d’une Suisse post-féministe ? Comment est-ce que l’on fait en Suisse pour protéger les femmes étrangères victimes de violences si on nous met devant l’évidence qu’en cas de divorce, on va nous mettre à la porte ? Et que dire de Mme Douno ? Que si elle est aussi débrouillarde pour sortir d’une relation violente, elle trouverait la force aussi de se battre dans un pays ou là non plus, elle n’est pas la bienvenue ? 

Nicole

2 Responses

  1. Avatar
    lie
    | Répondre

    Les bras m’en tombent ! Comment peut on voter une loi pareille ? On nage entre le cynisme et l’absurde, avec une vision totalement infantilisante de la femme ou plutôt de la femme étrangère.
    Comment se sortir d’une telle situation si on sait qu’au bout ça signifie un retour obligatoire au pays, comment peut on s’épanouir dans son couple avec cette menace permanente ?

  2. Avatar
    Dani
    | Répondre

    Moi aussi j’etait dans la meme situation…. Les suisse, sourtout les hommes, … EN ABUSENT … TROP.
    Avec la conscience de pouvoir qu’ils ont sur les femmes et leur permis de sejour ils ont le courage de faire n’importe quoi. Avec LA MANQUE DU RESPECT de l’autre commence a menacer et manipuler, … punir pour se goder des moments de satisfactions personelles.
    Le pire est que les autoritées, dans beaucoup des situations come la mienne, ils ne respectent leur propre lois. La loi qui dise qu’il ne peuvent pas retire un permis de sejour suite a une simple separation d’un conjoint suiss.
    A moi ils ont retire le permis B tout suite a la separation de mon mari, ils m’ont done la decision de quitter le territoire suisse sans specifie jusqu’a quand j’etait interdite dans ce pays. Je n’ettait meme pas divorcee. J’ai fait recours, toutes rejetee sans explication. J’ai perdu mon travail, j’ai quite la Suisse, et quand je retournais pour prendre la decision de divorce ils m’ont mis dans la prison.
    Pense vous que si c’etait quelqun qui vend des drogues il n’etait pire que moi.
    LA SUISSE ABUSE.

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